Appel à collaboration

 

Chères et chers collègues, chères et chers étudiant-e-s,

La Constellation des Manuscrits autographes est entrée dans sa seconde phase de développement, qui consiste, après avoir numérisé les manuscrits français modernes (XVIe-XXe s.) conservés à la fondation Martin Bodmer, à la mise en ligne de ce corpus exceptionnel sur notre site.

Dans l’esprit de collaboration ouverte qui préside à la mise en place du projet Bodmer Lab, et en raison des liens étroits qui unissent la Fondation Martin Bodmer à l’Université de Genève, un appel à contribution est lancé à l’ensemble des membres de la Faculté des Lettres. Pour l'heure, seuls les textes libres de droits d’auteur sont disponibles à la consultation. La plupart ont déjà été catalogués, mais il reste possible de participer au projet en analysant un ou plusieurs documents à partir de leurs reproductions numériques pour en fournir une notice descriptive. Chaque participant-e peut travailler sur le texte de son choix.

Le principe de collaboration étant celui du crowdsourcing non-rémunéré, il est fait en sorte que le nom de chaque intervenant-e figure dans la notice dont elle ou il se sera chargé-e pour que puisse être valorisée au maximum la participation de chacun-e. Chaque notice fait l'objet d'un travail éditorial de vérification avant sa mise en ligne.

En espérant que la possibilité de prendre part activement à une meilleure connaissance et visibilité de cet ensemble de manuscrits du plus grand intérêt pour la recherche éveillera votre enthousiasme, nous nous tenons à votre disposition pour de plus amples informations.       

                                                                                                     

Contact : marc.kolakowski@unige.ch

 

Exemple de document : une lettre de Corneille
 

Cette lettre de Corneille conservée à la Fondation Martin Bodmer est le seul manuscrit autographe de cet auteur en mains privées. Les recherches menées au sein du Bodmer Lab ont d'abord consisté à en établir une notice descriptive aussi précise et exhaustive que possible.

Ces recherches ont également permis, dans bien des cas, de retracer les parcours des manuscrits, de leur auteur jusqu'à nos jours. De ces recherches encore inédites, nous donnons ici un aperçu, avec cette lettre de Corneille, du dix-huitième siècle à nos jours, de la librairie jésuite du Collège de Clermont (aujourd’hui le Lycée Louis-le-Grand, à Paris) jusqu'à son achat par Martin Bodmer. 

 

Après la suppression de l’ordre jésuite en France (1764), elle fut conservée parmi d’autres document précieux dans le cabinet du bibliothécaire du Collège, Gabriel Brotier (1723-1789).

Son neveu, le mathématicien et philologue André-Charles Brotier (1751-1798) hérita de la collection au cours de la Révolution française. Cependant, en tant que royaliste, celui-ci fut condamné à la déportation en 1797, après avoir été accusé de conspirer contre le Directoire.

Les documents, dont la lettre de Corneille, furent saisis par son avocat, M. Lebon, comme garantie de paiement pour sa défense. Quelques années après la mort de son client, M. Lebon se mit en quête d’un libraire qui pourrait organiser une vente de manuscrits au meilleur prix. Il fut dirigé vers un ami et proche collaborateur du bibliophile Jean-Charles Brunet, le libraire Jean-Pierre-Agnès Parison (1771-1855), qui constitua à cette occasion un inventaire des pièces les plus intéressantes en vue de leur mise aux enchères.

La lettre fut alors vendue à Louise-Cordélia-Eucharis Greffulhe de Castellane (1796-1847), épouse du Maréchal de France Boniface de Castellane et amante de l’écrivain François-René de Chateaubriand.

A la dispersion de sa collection en avril 1834, le manuscrit fut cédé pour 400 francs (n°46 du catalogue de la vente) à Parison qui en connaissait la valeur d’après ses propres recherches, menées pour le compte de Lebon plusieurs années auparavant. Il resta en sa possession jusqu’à sa mort.

La lettre fut vendue pour 1000 francs (lot n° 205) en 1856 au négociant et collectionneur Etienne Pierre Louis Chambry (1787-1871). La veuve de ce dernier la garda jusqu’au 9 mars 1881.

L’anglais Alfred Morrison (1821-1897) s’en porta acquéreur pour la somme de 4000 francs.

Une copie du Catalogue of the renowed collection of autograph letters and historical manuscripts, formed by the late Alfred Morrison, Esq. of Fonthill, and now the property of Mrs. Alfred Morrison. The first portion (Londres, 1917), conservée à la Bibliothèque de Genève (BGE Aa 1707, vol. I, p. 32, n° 251), contient sous forme d’annotations manuscrites le prix réalisé pour chaque pièce, ainsi que les noms des acheteurs. Il ressort de l’analyse de cette source que le manuscrit fut vendu le 11 décembre 1917 au marchand d’art Thomas Agnew & Sons pour 135 livres sterling.

Arthur Meyer (1844-1924), alors directeur du journal français Le Gaulois, l’acheta probablement chez Agnew et le ramena en France avant 1921. En effet, son ouvrage Mes livres, mes dessins, mes autographes (Paris, 1921, p. 16, n° 62) présente le manuscrit comme élément d’un ensemble comprenant deux dessins originaux de Coraboeuf et Fournier, ainsi qu’une édition originale d’Horace de Corneille.

C’est avec cet exemplaire qu’il fut vendu en juin 1924 pour 10 000 francs (lot n°66) à Christian Lazard (1880-1943), partenaire de la banque Lazard. Celui-ci fut assassiné à Auschwitz le 23 juillet 1943.

La lettre de Corneille demeura dans la famille Lazard jusqu’à ce que Martin Bodmer s’en porte acquéreur le 19 mai 1967 (lot n°13) lors d’une vente aux enchères à l’Hôtel Drouot (Paris).

 

Une notice descriptive détaillée

 

Retour